« Il faut que l’Homme sorte à la rencontre de la vie hostile. »
Schiller
Je dis
J’ai à dire
J’imagine le dire
Seul, ici, dans un beau verger, sous les étoiles naissantes et pétillantes, étincelantes et vivantes, arbres vivants,
Sous les dires difficiles
J’essaie moi aussi de vivre « à propos »
Perdu, angoissé, isolé
Cette solitude et moi comme seul compagnon ou compagne
Vivant on me dit que je le suis encore
On me parle on m’explique, on donne des indications
Rares moments d’empathie, de « bonne » vision du monde
Je déchiffre les pancartes, j’observe les cartes ; comme Bouvier, je lis les cartes « comme des polars »… je me nourris de noms, de croisées, de chemins, de rivières engagées, monts et brumes, lumières externes et d’intérieur
On donne sens à la vie
J’ai peine à dire
J’ai peine à dire
Le lieu reste insaisissable
Comme le délitement de toute chose
Comment exprimer sa présence au monde ?
S’éduquer à la réalité… est-ce essentiel, est-ce superflu ?
L’abri de Bachelard « contre la nuit », au moins…
Les livres, les meubles, me suivent ; c’est mon identité
Le bien peu de moi
Si j’avais eu un talent, j’aurais peint tout cela, et l’infini même aux moments de vigueur
Le verbe « temps » a passé, s’est décliné, a utilisé toutes les conjugaisons, fortifié ou affaibli c’est selon ; on ignore s’il faut du mouvement, spontanéité, constance ou repli et visions internes. Immobilité ou voyage perpétuel.
Fortin ou semelles aux vents
Ou ta peau mordorée, mon deuxième moi ; l’aigreur connaissable ; les entours en tout bien ; modèle vaguement de bonheur, on pourrait l’imaginer – comme un marin ayant écroté le monde.
Mais l’ennui et la solitude –comme des chances à polir – sollicitent en moi un quelconque éclairage ; c’est encore cela : subsister dit-on , c’est déjà bien.

Paul Delvaux, la ville inquiète, 1940