Comme un long lévrier s'étire sur le sol,
L'ombre s'allonge auprès de nous et, sous la vigne,
Les moucherons ont clairsemé leur frêle vol :
La lune immense a le lourd glissement d'un cygne.
Les vieux pommiers sont noirs sur l'écran net du ciel :
Rameaux tors et nerveux sur le fond d'une eau-forte ;
La ruche ralentit ses doux rouets de miel ;
On entend une à une se fermer les portes.
Le soir est à côté de toi. Ne bouge pas ;
Tu pourrais l'éloigner, si tu faisais un pas.
Il me semble que le jardin monte vers nous.
L'air devient peu à peu plus odorant et doux.
Restons silencieux. Que la bonne fatigue
Nous engourdisse et calme les fièvres du jour.
Tu peux fermer tes yeux couleur de fraîche figue :
Sur toi, je veille avec la lune, mon amour.