"Entrons-nous dans une nouvelle époque de la chanson à texte? Ce sont les rappeurs qui semblent le dire: ils montent de leurs lycées, de leurs banlieues; ils ont des choses à crier d'urgence; ils les scandent plus qu'ils ne les chantent; ils profèrent, ils éructent et déjà, ils poétisent. Quel changement avec la génération précédente! Celle-ci vouait tout à la musique. La musique et le simulacre. On se déguisait à qui aurait l'air le plus extravagant, on mettait 400 000 watts de lumière, une agressivité de façade (au sens aussi où les baffles sont "en façade") et on tapait dans les mains: pas vraiment le règne du texte.
Le texte? C'était bon pour d'anciens chanteurs "Rive gauche", traînant des guitares aussi sèches que tristes dans des feux de camp sans sonorisation. Ils avaient un siècle! L'époque fondait tout sur le décibel. La puissance sonore bouffait le son et le sens. Les oreilles aussi fondaient.
Mais il y a des rappeurs qui, de la scansion, pourraient bien évoluer vers le lyrisme, puis vers le chant, puis le vers, la rime, bref, la chanson. Va-t-on revenir à la chanson?"
Jacques Bertin, écrit dans Politis, octobre 1991. (voir son site)
Si le rap était bien dénonciateur et parfois poétique, il a perdu au gré du temps ce rôle pour devenir un pur phénomène de mode (selon mes goûts et mes connaissances). Disparition de nouveau des textes "de la rue" ?
Et bien, non peut être, le slam est arrivé, réconciliant ces textes de la rue et par leur diction et par leur qualité. et parmi ces slameurs :

le slam : qu'est ce que c'est ?
Grandcorpsmalade nous l'explique sur son site :
(Photographie Willy Vainqueur)
"Il y a évidemment autant de définitions du slam qu'il y a de slameurs et de spectateurs des scènes slam.
Pourtant il existe, paraît-il, quelques règles, quelques codes :
- les textes doivent être dits a capella ("sinon c'est plus du slam" ?)
- les textes ne doivent pas excéder 3 minutes (oui mais quand même des fois, c'est 5 minutes?)
- dans les scènes ouvertes, c'est "un texte dit = un verre offert" (sauf quand le patron du bar n'est pas d'accord)
Bref, loin de toutes ces incertaines certitudes, le slam c'est avant tout une bouche qui donne et des oreilles qui prennent. C'est le moyen le plus facile de partager un texte, donc de partager des émotions et l'envie de jouer avec des mots.
Le slam est peut-être un art, le slam est peut-être un mouvement, le slam est sûrement un Moment. Un moment d'écoute, un moment de tolérance, un moment de rencontres, un moment de partage.
enfin bon, moi je dis ça." Grand Corps Malade ©
Grand Corps Malade dit ses textes avec humour, profondeur et grande poésie. Sa voix grave est très prenante et impressionne.
Allez sur son site écouter des extraits de ses textes et poèmes et voir quelques vidéos, c'est très bien réalisé.
Son disque qui vient tout juste de sortir est pure merveille.
Enfin quelque chose de nouveau dans ce monde finalement très gris en ce moment de la "chanson française". Bravo à lui et à ses compagnons de route.
Longue vie au slam s'il comporte de pareils artistes !
