à Rimbaud
Je dirai le désert
Et les fleurs qu’il a sous ses semelles semées
Il reste l’homme aux yeux charbon et les mauvaises photographies
où il pose tordu, bancal, sans sourire
Il semble fixer et juger le photographe
Et pourtant ces nouvelles sciences le passionnèrent
Il a le corps maigre de ceux qui vivent trop ou trop vite
Epuisant leur horloge ou malnutri
Fatigué, il poursuit son père dans les déserts arabes (**)
Traversant toujours de ses longues marches
« les membres brisés par mes longues errances »
( = écrit à 14 ans, impressionnant quand on connait la suite)(*)
Abandonnant soudainement tout ce en quoi il excellât
Cherchant son altérité de poète « ailleurs », silencieux dans ses pas
Silencieux dans son humanité, cassant sa poésie pour descendre au Sud
Et fuir ce redoutable hiver européen de 1879-1880 dont il parle sans cesse
mais :
Le soleil - Shams (féminin en arabe) – est aussi dur que l’hiver
pourtant :
Segalen dira de lui qu’il est un « prototype de résistance à la chaleur »(*)
Aden est là.
Plus tard, déçu, insatisfait et malade, son or à la taille, il sera accompagné par seize robustes noirs vers son destin européen, sa fin à Marseille, une jambe en moins à payer
Il mourra seul, sa mère et sa sœur, uniques et derniers compagnons
aucun ami ni africain ni européen
juste son seul silence de voyant
(*) : (cité par Alain Borer)
(**) : (son père fut longtemps capitaine du bureau arabe de Sebdou, en Algérie)
« Ma journée est faite. Je quitte l’Europe. » Rimbaud
« Tout cela est très bien et l’homme a tenu parole. » Verlaine