Pierre Reverdy, justement le voilà. poète secret par excellence, inadéquation de l'homme au monde, alliance totale à la poésie.
L'or roule au ruisseau
Le soleil à l'eau
Des ronds de chaleur
Filent
Et le coeur
S'arrête en sursaut
Le pont attrape vite un échelon plus haut
Près des remises assoupies aux façades lavées
A grands seaux de lumière
Où le silence s'est placé
Les signes convenus
Les fronts cassés
L'après-midi a fermé la barrière
L'écho montait la garde aux pas qui s'approchaient
Tous les trains d'air aigu venaient derrière
Et les bouches du vent dans l'ombre s'étouffaient
Dans les arbres remplis de gouttes fraiches
Dans les talus poudrés
Le long des torrents d'eau et des nuages secs
A travers les bouffées d'écume
Et les vagues de terre dans les champs labourés
Le véhicule lourd et l'avion sans ailes
Le poids de l'homme mort
Tous les battants du soir que l'on apporte
Les rideaux du décor
Et l'échancrure bleue ménagée pour la porte
Les étoiles du port
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un autre texte : "le soir"
Le soir, il promène, à travers la pluie et le danger nocturne, son ombre informe et tout ce qui l'a fait amer.
À la première rencontre, il tremble
où se réfugier contre le désespoir ?
Une foule rôde dans le vent qui torture les branches,
et le Maître du ciel le suit d'un oeil terrible.
Une enseigne grince
la peur.
Une porte bouge et le volet d'en haut claque contre le mur ; il court et les ailes qui emportaient l'ange noir l'abandonnent.
Et puis, dans les couloirs sans fin, dans les champs désolés de la nuit, dans les limites sombres où se heurte l'esprit, les voix imprévues traversent les cloisons, les idées mal bâties chancellent, les cloches de la mort équivoque résonnent.
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