Il savait qu'il n'accordait pas assez attention aux autres ; il pensait que sa vie était la vie. Pour lui se résumait ainsi le monde et la description de ce monde : sa vie. Et après tout : peut-on vraiment le blâmer ?
Que reconnaît-il réellement de cette femme pourtant là à ses côtés depuis si longtemps. Que connaît-il de ce monde, interface lumineuse et terrestre ; il le ressent quand pieds au sol il observe le bleu du ciel ou la lune et son halo.
Mais c'est le poids de son corps, la gravité qui donne foi à son existence. Mais sa douleur à lui n'est qu'à lui. Et le monde auquel il appartient se moque de cela.
Lui est donc au monde, seul. Seul, au monde et seule cette gravité donne vie. Il sait déjà qu'il ne montera pas au ciel. Même, les âmes ont un poids ; cadavres en putréfaction montant au ciel comme des ballons gonflés à l'hélium. Ce serait des dessins d'enfants.
Forcément avec le temps : on est déçu car son espace de vie est restreint, mince, riquiqui. Il y a certes un grand nombre de pans, d'autres pans dans la vie, mais le monde est bien cette pièce d'étoffe uniforme, on agite les bras inutilement comme des enfants imaginant jouer aux chevaliers et s'inventant des desseins à accomplir. Il recherche d'autres pans, mais il les sait inaccessibles ou plutôt utopiques. On pourrait dire qu'il se sent étranger au monde. Et seul le monde, pieds au sol, lui donne l'illusion de pouvoir exister. C'est aussi ainsi que parfois tournant sur lui-même il se voit ou s'imagine encagé ou comme une enchâssure inefficace, pierre précieuse qui n'intéresse personne.
Comment connaître les autres aussi bien que soi-même ? Alors qu'on est que soi ? Alors qu'il n'existe pas de double et que l'autre est lui-même isolé. Il y a toujours l'illusion de la communauté humaine ou alors les états de crise. Mais lors d'un quotidien sans surprise et longitudinal, la solitude alors est reine et s'impose forcément.
Il me reste ma main-doroir pour ta peau-gâteau, en cela, je suis le bon pâtissier de TON monde. Et ton sexe rouge-gorge est ma cave d'abandon. Ma grotte à moi, mon repli du monde. Et finalement le seul trait d'union qui me relie à une vie. Une sorte de cordon ombilical qui re-existerait.
« Autrui joue toujours dans la vie de l'individu le rôle d'un modèle, d'un objet, d'un associé ou d'un adversaire. » Freud


"la vie (résumé)" / photographies de Gilbert Garcin
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