En plein orgasme, nous fumes projetés contre le plafond, collés comme des mouches ; nos peaux s’étaient ventousés et nous eûmes grand mal plus tard lors de la détumescence à redescendre, à nous détacher ; tes peaux étaient airain en fusion, or et cuivre chaud, mes mains brûlaient à leurs contacts, et je me fis mal en desserrant notre étreinte, des lambeaux restaient crochés à ton contact fin ; tes jambes gainés de bas de laine gris et jarretière de soie noire filaient comme des bulles de gaz hilarant, et fortes, elles tremblaient comme épileptiques ; et ta toison argentée de tes langues bifides ou décolorée d’eau oxygénée semblait s'enflammer ; fixés au plafond, dans un grand rire puissant, nous vivions…
Tu parlais de nos enfances et des enfances d’autres, on parlait de nos amis, tu me disais ceux que tu désirais, tu aimais séduire, j’aimais quant moi mes altérités féminines, ces corps inconnus, tous différents ; bref nous nous aimions en heureuse confiance.
Nous vîmes par la fenêtre flotter quelques nuages amaigris, signe du temps passé ;
Au centre des jambes : ton sexe obus-fusée / Hanabi d’or, d’éclairs pour mourir en feux de couleurs - en feux d’oubli – des hanches comme des perles, comme des récitations d’écolières ;
Comment oublier à tes départs, tes corps étincelants ? Lumières de phares en pulsation et désespoirs spasmodiques.
Dans l’abandon de tes chairs, dans tes laines et lianes, dans tes matériaux souples et fluides, je m’auto-érotisais sans mal ; j’étais ton pantin putschiste happant l’happy end de tes soifs d’aimer embrunies. Au dégrisoir, juste à côté, là où on vieillit, revenaient alors en tsunamis réguliers des souffrances dégradées d’être à nouveau isolé, sans être à aimer ; ces changements : d’orgasmes à solitudes chaque fois me vrillaient le cœur et en faisaient une nasse à soucis.
Dans les marais noirs alors des dépressions, je comprenais les suicides de Gary ou de Pavese, les souffrances sans nom de Styron écrivant « Face aux ténèbres ». Et tant d’autres ! « Post-coïtum, animal triste. », pourquoi ? Ce cerveau encore avec sa biologie qui nous tire encore en arrière. Tristesse, de nouveau. Un échiquier d’hormones et de neuro-médiateurs en perpétuelle déconstruction.
Oh ! Les écharpes de tes jambes à mon cou ! Oh tes lèvres dénudées à ta peau blanche ! Oh la chimie de tes suints et ors, l’alchimie de tes broussailles, de ton corail ! Je suis en floraison au ras de ton sexe, prêt pour un nouveau flacon d’ivresse, un beau flocon de tes proses fessières.
Plus tard, à l’aliénation N° 21-582, lorsque nous boirons l’apéro avec la camarde, la faucheuse, la vilaine, nous nous souviendrons amicalement de tous nos amis déjà morts et qui avaient souhaité réellement autre chose ; sans doute nous serons alors réconciliés avec cette morsure à l’âme ; et nous repartirons dans l’exploration totale, exhaustive, épuisante de nos corps respectifs ; il faut conjurer cette fin ultime ; visitons chaque rayon de nos corps et âmes ruches. Boire la vie de nos sexes opposés « à fond », « in extenso » quitte à en mourir…