Photographie © jean-paul Bataille
Vu l'ami Jacques samedi et dimanche derniers dans ce petit lieu minuscule (70 places) où nous nous sommes entassés dans la bonne humeur et la ferveur ; tous assez vieillissants (allons disons le)(une bonne moyenne serait 55-60 ans) ; la chaleur des amis des amis, la fraternité de ceux qui aiment cette chanson si particulière, si singulière, si généreuse...
C'est le seul endroit où sans chichi, sans souci , je vois des personnes "âgées", accepter de s'asseoir par terre, les coussins sont jetés du haut par quelques compères comme Philippe Forcioli dimanche soir (il y a deux-trois ans c'était François Morel). Il y a de la jeunesse dans tout ce public là.
28 ans aussi que l'ami Laurent Desmurs accompagne Jacques (1984 leur première collaboration !) de ses doigts agiles, encore un grognard de plus.Pour le reste vous savez - si vous venez ici régulièrement - toute l'affection que je porte à cette chanson là et c'est peu dire. Voici un texte de Bertin qui vient à propos...
Pour les Aixois : Claude Semal (prix Jacques Douai 2012) dans 15 jours...
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Hymne
vous étiez réunis ; je vous sentais dans l’ombre
les yeux sur moi comme ceux de mille félins
amicaux, attentifs et vous étiez chacun
plus que lui-même – ensemble plus que votre nombre !
vous étiez réunis ; toutes vos solitudes
prêtes à s’enflammer à l’inverse brasier
dans l’imper gris qui brûle bien je vous voyais
à l’arrêt d’autobus, fiévreux de lassitude
et vous me parliez néanmoins dans le silence
vous parliez haut, vous survoliez les continents
vous courriez loin dans les vallées tristes du temps
sur les falaises des océans d’espérance
vous étiez réunis dans le noir, seuls peut-être
chacun si seul, mais vos passés formant faisceaux
on avait pour un soir repeint l’ancien vaisseau
vous étiez beaux et généreux comme des êtres
toutes vos vies faisaient, décoré de drapeaux
un mail, avec des fleurs aux fenêtres des âmes
si je brûle, que ce soit comme une oriflamme
au moins, puisqu’on meurt, que ce soit comme un flambeau
je sais les vies sans joie, la patience trop longue
les maisons sans amour et les cours sans soleil
le chagrin dérivant dans les nuits sans sommeil
la folie qui raye la vitre comme un ongle
tout ce que vous n’osez pas dire, qui vous pèse
la foi qui n’a nulle issue, le désir d’amour
je sais cela. or vous étiez comme la braise
qui chante et fait ce parfum d’orchestre du four
et toi tu étais morte et toi tu étais loin
le passé est un mur, l’avenir est sans porte
oui mais il y a comme un chant sacré qui nous porte
et nous chantons l’homme inutile et l’espoir vain
et nous chantions, oh nous chantions, comme un seul homme
puisqu’il faut vivre, au mal opposons la beauté
et s’il faut pleurer, ah que ce soit au moins comme
des hommes, dans le noir pleurant d’humanité
je suis ce chant ! je suis toute vos voix qui montent
cette rumeur de foule en marche au loin gonflant
dans les sentiers de la montagne s’arrachant
ce cavalier avec son trésor dans les fontes
où allez-vous ? vers quelle illusion de destin ?
hommes naïfs, redescendez voyons sur terre
on nous raillait, on nous conseillait de nous taire
et cesser de bouger nos ailes ainsi pour rien
ce soir-là, vous et moi étions l’hymne du monde
en nous ce qui vibre, ce qui vit, c’est le chant
la révolte nous meut, l’amour lui seul nous fonde !
mais ce feu qui nous porte ensemble, c’est le chant
ce soir-là, vous et moi fûmes l’hymne du monde
en nous ce qui vibre, ce qui vit, c’est le chant
oui, la révolte nous meut. oui, l’amour nous fonde
mais ce feu qui nous porte ensemble, ce feu qui nous porte
c’est le chant !
© Jacques Bertin