"Si la matière grise était plus rose, le monde aurait moins les idées noires."
Pierre Dac
Certaines choses
Nous entourent « et les voir
Equivaut à se connaître »
George Oppen
"Mais rien de cette nature n'est définitivement acquis. Comme une eau, le monde vous traverse et pour un temps vous
prête ses couleurs. Puis se retire, et vous replace devant ce vide qu'on porte en soi, devant cette espèce d'insuffisance centrale de l'âme qu'il faut bien apprendre à côtoyer, à combattre, et
qui, paradoxalement est peut-être notre moteur le plus sûr." Nicolas Bouvier
« La poésie vient vers nous, on ne sait d’où, et elle nous quitte, allant vers on ne sait quel au-delà. Mais en passant, elle nous laisse des mots et elle nous fait des signes dont l’interprétation est inépuisable. » Gabriel Bounoure
" Avec tes défauts. Pas de hâte. Ne va
pas à la légère les corriger. Qu'irais tu mettre à la place ? " Henri Michaux
"Savoir que nous ignorons tant de choses suffit à mon bonheur." George Oppen
"Si la matière grise était plus rose, le monde aurait moins les idées noires."
Pierre Dac
je déambulais au creux des chemins de moi-même
en songeant de nouveau à elles toutes
je ressentais la misère de n'être que moi-même
de l'air d'être irréelles en peau souple et voutes
j'aurais aimé dormir au fond de vos cryptes
un foetus de plus dans vos endomètres
j'aurais revécu alors l'enfance à paître
ma psyché en larmoiement comme un script
ma paresse en toi et pourtant plein de caresses
j'aurais grandi encore pour ce clochard
clochard céleste heureux dans vos plumards
une seule obsession en tête : vos fesses
paître ou paraître à toi / roi ou sujet
mon appartenance au concret est délicate
mon lieu à définir : libre ou encagé
la mort m'attend telle une belle frégate
à elles toutes mes amours et mes craintes
j'eus souhaité toujours me repaître de vous
ne l'ai pas fait / me reste des plaintes
et des désordres en moi, beaucoup
Tango ou Le tango de l'archange / Kees Van Dongen
(Musée de Monaco, 1922-1935)
l'aube féodale
sans coup férir est advenue
fêlés les noirs ont disparu
les rivages nocturnes s'estompent
il y a des coups de lumière tirés en l'air
hébété je me lève
enfermé en moi même encore
mon corps à toute heure trop lourd
fission fusion avec le jour
et puis la présence au monde appelle
près de moi une autre forme
qui s'éveillera alors
deux, nous étions deux ainsi
dans cette nuit opaque et sombre
deux solitudes donc en toute désespérance
"soudain l'été dernier" Martial Raysse 1963
ce matin au lever, tôt, le soleil dans un angle est venu taper, déjà très chaud
sa frappe fit du bien, je fermais les yeux, sous mes paupières la rétine donnait des tons chauds : rouge, orange et quelques points noirs dont la taille variait
mes yeux se réchauffaient au ras des nerfs optiques
simplement donc
un jour nouveau
facilement
solitude toulousaine et estudiantine et estivale
carton, être humain et papiers, oeuvre inachevée.../...
" La vie est une phrase ininterrompue. "
Victor Hugo
" Je cherche la clef de ces évasions vers les pays désirés... "
Henri Alain Fournier
Assez rare finalement et pourtant présente partout en France, voici une orchidée particulièrement atypique : par sa beauté et ses longs labelles dont le lobe médian est très long et enroulé en spirale et par sa mauvaise odeur, très évocatrice d'un bouc passant par là... La plante aime les substrats secs, les collines herbeuses bien ensoleillées.
Floraison mai-juillet, présente jusqu'à 1000 mètres d'altitude.
" Je me suis toujours tenu à distance. Des contorsions de mes proches comme des simagrées de mes contemporains. S’il me faut prendre la plume, je fais court, plat et me borne aux politesses d’usage. Je m’impose également cette concision dans le quotidien. J’abrège tant qu’il est possible les rencontres et fuis les conversations. Par dessus tout je crains les fâcheux qui vous tiennent la jambe en vous accrochant le bras. Par crainte de verser moi aussi dans ce travers, j’ai depuis longtemps pris le parti de me taire. Que je sache, nul n’est venu s’en plaindre. Oh je ne suis pas dupe, ceux qui au départ prenaient mes silences pour une ouverture d’esprit sinon de l’écoute intelligente ont fini, à la longue, par se lasser. J’aurais dû relancer par des « moi je » voire des « ah bon ? » manifester de l’intérêt, une empathie, mais il ne me vient aucune répartie qui vaille que je quitte ma réserve. Econome en société, je suis également bref dans l’étreinte. Un minimum de préambules, je fais jouir et basta. On ne va pas y passer le réveillon. Que l’on ne se méprenne pas, je ne cherche nullement à gagner du temps, je ne saurais qu’en faire. Ma vie intérieure n’ouvre sur rien. Me prélasser dans la spiritualité n’est pas mon genre : les culs-bénits me terrifient avec leur éternité. Ce n’est pas parce que je refuse de meubler mon existence que je dois laisser les imbéciles m’encombrer de leur importance. Mais je crains moins le vaniteux qui se cherche un public que le regard de celui qui par hasard lèverait encore les yeux sur moi. La nature est faible et toujours prompte à s’accoquiner. S’efforcer de paraître sans relief est une ascèse. Se retirer du monde une activité féroce : il faut s’y employer avec obstination. J’ai ma propre façon d’opérer. Chaque jour de ma vie je traque ce que je peux soustraire au commerce d’autrui. Sans qu’il n’y paraisse trop. Pas question de passer pour fou, ils m’ôteraient le plaisir que j’ai à me détacher d’eux. Rira bien qui rira le dernier. Bientôt je couperai le fil d’Ariane et ciao, je tirerai ma révérence. Je vois d’ici leur tête quand ils s’apercevront, quelques mois voire quelques années plus tard, que je leur ai faussé compagnie. Mon inexistence va leur sauter aux yeux tandis qu’aux premières loges, j’en serai l’unique spectateur. J’aurais donné ma vie pour en avoir une... "
" Ecrire : la seule façon de parler sans être interrompu."
Jules Renard
En retard de floraison par rapport à l'ophrys petite araignée, la voilà qui arrive et en haut de mon champ en très grande quantité ; chaque année je ne tonds pas cette partie de la prairie afin d'être sûr de les voir apparaitre !
Labelle assez typique ; groupe monospécifique.
"Pour l'âme de ma Hanna,
Pour l'âme de Berl mon frère,
Tués avec les fils de leur famille,
Et avec mon peuple tout entier,
Et il n'est pas de sépulture."
Y.K.
Il est des textes rares et précieux.
"Le chant du peuple juif assassiné" de Yitskhok Katzenelson en est un.
Né en 1886 en Biélorussie dans une famille de lettrés, dès 18 ans, il publie ses premiers poèmes à Varsovie.
Il reprend l'école paternelle juive de 1910 à 1939 et devient populaire dans le milieu yiddish par sa prose, ses poésies, son théâtre...
Puis suivront l'enfer et les 3 années de ghetto à Varsovie (les intellectuels et membres de partis politiques se réfugient tous à Varsovie - erreur - 500.000 Juifs se verront ainsi enfermés). Un jour qu'il était absent, deux de ses fils et sa femme sont pris et envoyés en camp de concentration.
Une résistance "culturelle" s'installe par la littérature essentiellement (tout le monde écrit pour laisser un témoignage), mais aussi par la photographie. Laisser des traces devient une obsession.
Les poètes deviennent des porte-paroles essentiels.
Les écrits sont cachés dans des récipients plus ou moins hermétiques.
La renommée de Yitskhok Katzenelson fait qu'on le force à quitter le ghetto avec son dernier fils, afin -espère-t-on- de lui faire quitter l'Europe.
Interné alors au camp de Vittel , camp pour "personnalités" où il bénéficie lui et son fils d'une chambre privée. Il y rédige alors ces fameux chants de désespoir et de colère ; il est finalement déporté à Auschwitz avec un de ses fils en avril 1944 où il est gazé dès son arrivée le 1er Mai.
Ecrit en yiddish dans le camp de Vittel d'octobre 1943 à janvier 1944, ce texte est miraculeusement récupéré. Il est un témoignage unique sur la barbarie nazie et le ghetto de Varsovie. Erri de Luca vient de traduire ce texte en italien, il en parle dans son dernier roman.
"Le feu du ciel se déverse sur la Pologne le 1er Septembre 1939 et c'est ainsi que commence l'extermination, l'éradication du royaume ashkénase en Europe.
.../...
Le 27 août 1943 Yitskhok Katzenelson écrit :
"Je vais cacher ces papiers, car si les meurtriers allemands les trouvent, ils vont me tuer et, ce qui est pire, ils vont détruire ces notes fragmentaires qui ne racontent qu'une infime partie des tortures qui nous furent infligées par ce peuple d'assassins."
Myriam Novitch raconte aussi la manière dont furent enterrées les trois bouteilles scellées du Chant du peuple juif assassiné " près de la sortie à droite, au sixième poteau, celui qui porte une fente en son milieu, au pied d'un arbre."
Les premiers textes parurent en 1960 et leur publication intégrale en 1984.
.../...
Dans la situation extrême où se trouvait Yitskhok Katzenelson, on reste abasourdi de constater qu'il a choisi une forme de contrainte formelle maximale : le poème se compose de 15 chants, chacun comportant 15 strophes de 4 vers, rimes croisées en permanence."
Rachel Ertel (postface)
« en réalité, il existe deux sortes de vie, selon la formule de Viri : celle que les gens croient que vous menez, et l’autre ».
Attention, « Light years » paru en 1975 et traduit en français par « Un bonheur parfait » est un livre atypique dans son écriture et sa linéarité parlant d’un sujet pourtant bateau : le couple marié, comment accepter ou refuser sa (ses) liberté (s), le temps qui passe, les amis, les amours aussi ; ce livre est un régal.
« Un bonheur parfait » est D'ABORD incroyablement bien écrit, J. Salter est un adepte des phrases courtes, des descriptions d'une efficacité invraisemblable ; à petites touches pointillistes, il nous montre la très lente déchéance d'un couple qui a tout pour réussir : une belle situation, de l'intelligence, de la sensibilité, de la culture, de la beauté, des amis, de la jeunesse et deux petites filles charmantes. Oui, mais voilà le temps passe, l'un veut réussir dans son métier et tombe amoureux comme seuls les hommes savent le faire c'est à dire avec immaturité, fierté et jalousie ; elle, cherche quelque part sa liberté, liberté totale, sexuelle elle aussi, mais aussi vivre "sa" vie propre ; plus tard il s'éloigneront alors qu'ils s'entendent parfaitement (aucune scène de brouille), finalement juste insatisfaits de ce monde familial, de cette vie qui bien sûr avec le temps passant devient une vie « comme tout le monde », un peu monotone, pleine de frustrations, loin des idéaux de la jeunesse.
Viri est architecte, brillant et beau ; Nedra est belle et intelligente, inaccessible aux autres hommes semble-t-il, mère comblée. Couple parfait des années 70. Ils vivent près de New York, reçoivent beaucoup, cherchent une vie sociale ou sociétale idéales. Deux petites filles « parfaites », un chien présent. C'est un roman terrible dont on ne sort pas indemne. Jeunes amoureux, jeunes mariés, fuyez ce livre magistral !
La dégradation des relations est subtile, par petits à-coups légers, elle n’en est pas moins profonde, même si entre Viri et Nedra se sont installées une confiance et une amitié à toute épreuve. Je n’en dis pas plus pour ne pas gêner le bonheur de votre lecture…L’équilibre fragile maintenu depuis longtemps va se rompre mais en douceur. C’est l’apprentissage des renoncements. C’est aussi, l’âge aidant, la vie qui devient une attente, une attente de quoi, personne ne sait réellement, oh ! la mort bien sûr, mais aussi autre chose, l’attente de celui ou celle qui n’attend plus rien. Faut-il se satisfaire de ce que l’on possède, alors que l’on sait tous qu’il y a toujours mieux ; ou doit-on se « résigner » et accepter juste ces petits bonheurs sans chercher de passions plus fortes ; les enfants comptent cependant et il y a de très belles pages d’amour filial dans ce livre étonnant. Mais le mariage ? Le mariage est une prison dit Nedra. Que devient la place de l’individu dans le couple ? Fusion ? Destruction ?
Vous serez cependant surpris par deux choses : le style parfait de cet écrivain, c’est tellement bien écrit et descriptif que les premières pages peuvent sembler difficiles (apparemment cela gêne certains lecteurs) (cela me rappelle Pasternak) ; d’autre part on passe de personnages en personnages sans réelle cassure, sans passage de paragraphes et comme H. Murakami dans l’extraordinaire « Chroniques de l’oiseau à ressort », on s’attache à plein de personnages secondaires lesquels finalement disparaîtront du schéma narratif « comme dans la vraie vie ».
James Salter définitivement l'un des plus grands et ce livre atypique et étonnant est un vrai chef d'oeuvre !! C’est un écrivain qui publie peu, et comme P. Auster ce sont les Européens qui l’ont fait réellement connaître. Depuis chacun s’accorde pour dire qu’il est un écrivain majeur. Il est passé il y a peu à « La grande librairie » sur France 5. Il décida un jour d’écrire «pour lutter contre la vie qui s'en va petit à petit».
Extraits du livre :
"Leur vie est mystérieuse. Pareille à une forêt. De loin, elle semble posséder une unité, on peut l’embrasser du regard, la décrire, mais, de près, elle commence à se diviser en fragments d’ombre et de lumière, sa densité vous aveugle. A l’intérieur, il n’y a pas de forme, juste une prodigieuse quantité de détails disséminés : sons exotiques, flaques de soleil, feuillage, arbres tombés, petits animaux qui s’enfuient au craquement d’un rameau, insectes, silence, fleurs. Et toute cette texture solidaire, entremêlée, est une illusion. En réalité, il existe deux sortes de vies, selon la formule de Viri : celle que les gens croient que vous menez, et l’autre. Et c’est l’autre qui pose des problèmes, et que nous désirons ardemment voir".
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"Il n’existe pas de vie complète, seulement des fragments. Nous sommes nés pour ne rien avoir, pour que tout file entre nos doigts. Pourtant, cette fuite, ce flux de rencontres, ces luttes, ces rêves ... il faut être une créature non pensante, comme la tortue. Etre résolu, aveugle. Car, tout ce que nous entreprenons, et même ce que nous ne faisons pas, nous empêche d’agir à l’opposé. Les actes détruisent leurs alternatives, c’est cela, le paradoxe. De sorte que la vie est une question de choix – chacun est définitif et sans grandes conséquences, comme le geste de jeter des galets dans la mer. Nous avons eu des enfants, pensa-t-il ; nous ne pourrons jamais être un couple sans enfants. Nous avons été modérés, nous ne saurons jamais ce que c’est que de brûler la chandelle par les deux bouts".
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« La liberté dont elle parlait, c’était la conquête de soi. Ce n’était pas un état naturel. Ne la connaissent que ceux qui voulaient tout risquer pour y parvenir, et se rendaient compte que sans elle, la vie n’est qu’une succession d’appétits, jusqu’au jour où les dents vous manquent. »
Belle plante , beau rose avec des labelles bien trilobés.
En floraison assez longtemps de maintenant au début de l'été ; la forme générale de l'infloresence évoque une pyramide...
Xérophile et calcicole.
toutes photographies : frenchpeterpan
En floraison, maintenant, assez commun en Europe, encore qu'il est manquant en Bretagne et rare (et donc protégé) en Franche-Comté.
J'aime particulièrement cette orchidée en début de floraison avec ses boutons violets vifs et profonds. (casque brun violet)
Ensuite la plante déploie une belle fleur rose violine ponctuée de pourpre ; le labelle évoque les bras et la robe d'une femme dit-on...
(Encore que souvent un petit appendice peut être trompeur)(on va dire un kilt donc) :-)
belle fleur majestueuse sur pelouses calciformes...
On l'appelle "Pentecôte" dans le Sud-Ouest.
Hybrides décrits avec l'orchis militaire.