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"Le poète est un archer qui tire dans le noir." - Salah Stétié -
"Soyez un écrivain mineur, cela vous rajeunira." 
Dominique Noguez

"Cette femme était si belle
Qu'elle me faisait peur."
 Guillaume Apollinaire

"In a place far away from anyone or anywhere, I drifted off for a moment." -- Haruki Murakami --


"Être poète n'est pas une ambition que j'ai. C'est ma façon à moi d'être seul."   -- Fernando Pessoa --

"Ca va tellement mal aujourd'hui que je vais écrire un poème. Je m'en fiche ; n'importe quel poème, ce poème." -- Richard Brautigan --

"J'écris à cause du feu dans ma tête et de la mort qu'il faut nier."
Jacques Bertin

"O mon passé d'enfance,
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Fernando Pessoa


« La mort c’est l’infini des plaines
et la vie la fuite des collines. »
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-- je vous souhaite un bon passage... --


"Mais rien de cette nature n'est définitivement acquis. Comme une eau, le monde vous traverse et pour un temps vous prête ses couleurs. Puis se retire, et vous replace devant ce vide qu'on porte en soi, devant cette espèce d'insuffisance centrale de l'âme qu'il faut bien apprendre à côtoyer, à combattre, et qui, paradoxalement est peut-être notre moteur le plus sûr."  Nicolas Bouvier

« La poésie vient vers nous, on ne sait d’où, et elle nous quitte, allant vers on ne sait quel au-delà. Mais en passant, elle nous laisse des mots et elle nous fait des signes dont l’interprétation est inépuisable. » Gabriel Bounoure

" Avec tes défauts. Pas de hâte. Ne va pas à la légère les corriger. Qu'irais tu mettre à la place ? " Henri Michaux


écrivez moi si vous le souhaitez :    

Soyez indulgent, je ne suis qu'un petit écrivaillon tentant d'écrivasser

Mai 2008 : "L'apéritif de la neige"
est "paru"

Si vous êtes intéressé : laissez moi un message
(133 pages de poèmes et textes poétiques, pour la plupart ici sur mon blog)

"Le meilleur choix de poèmes est celui que l'on fait pour soi." Paul Eluard

"Savoir que nous ignorons tant de choses suffit à mon bonheur." George Oppen

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4 novembre 2006 6 04 /11 /novembre /2006 09:35
- Le temps sidéral est égal à l’angle horaire du point vernal.
- Pardon ?

J’étais là, attablé au zinc, à déguster un pastis bien frais, dans un petit verre. Depuis peu, à la fin de mon travail, je m’arrêtais dans ce bar, pourtant guère avenant mais qui se situait sur ma route. J’hésitais à rentrer trop tôt chez moi qui était devenu graduellement et insensiblement plus vraiment un « chez moi », ma femme et les enfants ayant étendu leur pouvoir partout dans l’appartement. Je n’aimais pas particulièrement boire, ni parler, mais finalement j’aimais bien l’ambiance très masculine de ces bars à l’heure de l’apéritif où chacun craint de rentrer chez soi. Le café est un lieu neutre où parfois même des amitiés se nouent.

- Pardon, vous avez dit ?
- Non, excusez-moi, je parlais du temps, je fais des variations sur le temps, je m’amuse avec le temps, le temps qui passe, le temps qu’il fait, à mi-temps, temps mort, et oui… le temps.

Il avait l’air un peu fatigué, avec des cheveux grisonnants et broussailleux, et de gros sourcils jaunâtres qui feraient peur aux enfants, un petit ballon de blanc devant lui. Largement l’âge de la retraite. Le serveur discrètement me fit d’un petit mouvement de tête comprendre qu’il avait « dépassé la dose ».

- Oui j’aime parler, mais personne n’écoute, alors je vais dans les cafés et attends qu’un public adéquat soit à mes côtés.
- Moi, je suis un public adéquat ?
- Oui, vous avez l’air sympathique et puis perdu un peu aussi, égaré dans un lieu qui n’est pas le vôtre, hors temps.

Il rit légèrement. Puis reprit :

- Chaque jour, le matin, j’ouvre le dictionnaire et regarde un mot qui me plait, avec sa définition essentielle et toutes les variantes et toute la journée je rumine ce mot, il valse dans ma tête, c’est mon poème du jour, mon pas japonais à moi. Et ça fait passer le temps…
- Et aujourd’hui c’était « le temps » ?
- Oui, un bien beau mot ; c’était le bon temps, le temps des vendanges, en temps et lieu, le temps de réaction, le temps approche, à temps…

Je venais de terminer mon verre, le bruit du café était assez sourd et éreintant, les lumières trop vives,  je commençais à me demander si je n’allais pas discrètement sortir. J’avais eu une journée difficile. Mais mon voisin se rapprocha de moi et me dit en souriant :

- Pouvez-vous m’accorder un peu de temps ?
- Oui bien sûr, j’en ai un peu dis-je poliment.
- Que voulez-vous savoir sur le temps ?
- Moi ? rien, c’est vous…
- Non, non. Vous donnez l’impression d’avoir des questions à poser, profitez un je suis aujourd’hui « au point » sur le temps. J’attends vos questions… est-ce que vous avez bien employé votre temps aujourd’hui, au moins ?
- Ah, ah ! Non pas spécialement, je ne prends pas le temps si je puis m’exprimer ainsi, je vais trop vite, je fais tout trop vite, cela m’ennuie en fin de compte. Tout va trop vite.
- Ah ! le temps… il faut toujours prendre son temps.

Il me fixa avec un petit sourire :

- Du moins de temps en temps…
- Qu’avez-vous appris donc sur le temps vous même ?
- Oh ! rien de bien spécial, des banalités, mais même les banalités peuvent plaire et puis c’est ça la vie, non ? des banalités banales, le temps qui passe, le temps qu’il fait, de tout temps, le temps approche, à quatre temps, le temps universel, en temps et heures…

Il fit rapidement un signe au serveur qui le resservit promptement.

- Et resservez Monsieur, fit-il.
- Merci, mais ça sera le dernier.
- Comment ! Vous n’avez pas le temps ?
- Et vous ? Vous cherchez à gagner du temps ? Dis-je assez habilement.
- Bravo ! Un point pour vous, ah, ah, il faut que je me refasse ; je vous ai bien choisi, vous êtes plein de finesse.
- Vous êtes trop bon …

Subitement il s’arrêta de parler et fixa son verre, puis le but doucement mais en totalité par petites gorgées, lampées ; il le reposa vide sur le comptoir. Cherchait-il la bonne répartie ? Réfléchissait-il ? Je me taisais, cherchant hypocritement peut-être à clore le débat. Je me mis aussi à finir mon verre avec lenteur.

- Bien employer son temps, le temps approche, accordez-moi du temps, je n’ai pas le temps, gros temps, c’était le bon temps, le temps des vendanges…

Peu à peu le timbre de sa voix devint indécis et il commença à balbutier, il reprit mais en hésitant et regardait droit devant lui comme en transe :

- Temps humide, avoir le temps, avoir fait son temps, dans la nuit des temps, faire son temps, gros temps, perdre son temps, prendre son temps, prendre du bon temps…
- Tuer le temps dis-je brusquement et imbécilement.

Il se tut, puis me dévisagea lentement.

- Vous ne m’octroyez pas de point ? Ironisais-je encore bêtement.
- Si, si… Vous le méritez…

Mais mon intervention le laissa sans voix, et sa figure se fit bien grave et triste. Il semblait parti ailleurs. Le serveur avait retiré son verre, sans doute pour faire comprendre que pour ce soir ça serait tout. Une sorte de silence entre nous deux se fit, malgré le brouhaha alentour. Stupidement j’essayais de reprendre :

- Au temps pour moi.
- Non, non, tuer le temps c’était parfait, je l’avais oublié celui-là.

Il se retourna et se rapprocha très près de moi, un moment je crus qu’il allait me frapper tant son visage devint violacé et hagard. J’imaginais qu’il allait encore balbutier mais il parla très clairement.

- Tuer, tuer le temps, bien sûr. Tu sais petit, j’attends depuis un moment d’ouvrir le dictionnaire à la lettre « S », au mot « suicide » afin de le décliner selon toutes les sauces. Un mot que j’attends, ça fait même un bail ! Trop longtemps que j’attends ce putain de mot. Bien trop longtemps.

Et puis il se tut. Je restais là un moment, hésitant, mal à l’aise. Finalement je ne dis rien, préférant comme souvent le silence aux mots de trop. Après deux, trois minutes je partis après l’avoir salué ; il ne me répondit pas.
Dehors, j’arrêtais mes pas et regardais à travers la vitre embuée et grasse, je le vis discuter sèchement avec le serveur qui apparemment lui remis un verre et le resservit de Muscadet. Cela me fit plaisir et je pus rentrer chez moi un peu moins inquiet. En route je cherchais un mot pour le lendemain, un mot à décliner ; une bruine fine se mit à tomber, le froid de la pluie me rasséréna.





"Le Temps"
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commentaires

B
Bon. pour commencer dans la banalité, étant donné que ce fût déjà signalé. La chute mériterait peut etre un travail plus approfondi, quoique sa simplicité lui donne aussi sa force, puisque nous sommes sur un sujet pointilleux dans une atmosphère banale, donc il faut accorder à cette chute une logique implacable.sinon j'ai beaucoup aimé la façon d'aborder ce sujet en jouant sur les expressions et les sonorités dans ce reflet où justement l'hommetente d'échapper au Temps(ah douce folie, -le bar-.) Que dire mise à part que la construction de cette nouvelle semble au premier abordsavoir été maniée avec une plume fine, délicate et minutieuse.\o/ elle se lit avec régale, et on ne voit pas le Temps passer, il coule de source...ahah...
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M
Bonjour, au détour de recherches sur Prevert , j'ai découvert votre espace , je tourne au fur et à mesure les plages de vos mots et je suis ravie de découvrir une personne aux phrasés qui m'emportent dans cette poésie qui m'est chère...:)<br /> Je reviendrais ...:-)<br /> Marie
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A
En ce moment très friande des réflexions sur le temps, je suis ravie de lire ce texte aujourd'hui  ; c'est fou le nombre d'expressions que l'on peut trouver sur ce fameux temps qui passe, mal ou pas comme on le voudrait, mais continuellement . J'aime bcp l'idée des apéros masculins, le soir avant de rentrer chez soi pour les hommes fuyant le quotidien qu'ils ont pourtant construits eux aussi, non ? !!!Je crois que moi aussi j'aurai aimé une fin plus ouverte, plus mystérieuse.
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F
oui tu as raison, ça serait pas plus mal d'arrêter ça plus brutalement <br /> amitiés marco
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C
Bravo pour cette nouvelle!Moi,je me serais arrêter d'écrire, à la phrase"il ne me répondit pas" ,car le vieux buveur est un personnage excessif et quelque peu influençable. Donc une chute qui interroge d'autant plus:va-t-il se suicider ou pas?<br /> Mais quelle écriture fluide! Bises.Nat
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F
...de l'amour, des copains, et de l'aventure.
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